Maux des mots.

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Mots et maux sont si souvent couplés qu'ils en sont devenus stéréotypés. Les mots des maux, les maux des mots, nous mettons des mots sur les maux et des maux deviennent mots, mais les mots deviennent maux, eux aussi, et nous les maudissons quand ils nous fuient.

Je connais ça un peu trop bien. L'été dernier, je me terrais dans ma chambre et je snobais le soleil afin d'avancer péniblement, ligne par ligne, mot par mot et à grand maux, sur mes histoires commencées depuis voilà la première déjà.

Moi de première, moi de prépa. Qu'est-ce qui a changé ? Qu'est-ce qui est resté ?

J'aimerais dire que j'ai changé. C'est vrai, d'ailleurs : j'ai grandi. Aussi cliché que cela sonnera, j'ai appris que l'opinion des autres n'était pas si importante, qu'il fallait avant tout apprendre à respecter son avis avant de chercher celui des autres. Il s'agit avant tout de partir sur un pied d'égalité.

Mots des maux, j'ai posé des phrases sur ce qui me peinait, me peine. Me peinera, peut-être ?

Maux des mots. Mais les mots m'ont fait mal aussi, car je me donnais une sacrée pression à continuer ces histoires ! Je ne veux pas dire par là que je les arrête. Apolline et Melinda ont droit à leur fin, elles aussi. Non, désormais, je refuserai de me faire l'esclave du clavier. J'écrirai quand l'envie me viendra. Et voilà. Les mots me seront désormais un jeu.

M(au)o(t)x. Mais il y a eu du nouveau dans ma vie aussi.

J'ai appris à réfléchir sur la langue elle-même. Le moins qu'on puisse dire est que la prépa prépare, mais bien plus que cela encore ! Il m'est arrivé d'accumuler les nuits trop blanches pour terminer des devoirs à temps. Plutôt que de devenir plus assidue, j'ai appris à me remettre en question. Le grec, le latin, les larmes. Le français, où j'ai appris à ne plus dénigrer les textes anciens pour à la place m'ouvrir à leur beauté. Grandir, c'est sans doute un peu tout ça.

J'ai aussi rencontré quelqu'un. Sur Instagram, rien de moins ! Maintenant, on se fait des appels vidéo tous les deux soirs. Il m'écoute parler du propre de la poéticité, il me fait rire à en avoir mal aux joues, et c'est dans ses yeux noisette que je me reconnais le plus. Un petit bonheur vieux de quatre mois déjà, vécu entièrement en anglais ; parfois ma langue maternelle me manque, c'est un peu ça qui m'a poussée à revenir ici, d'ailleurs. Maux des mots.

Parfois, il m'arrive de passer des journées sans parler. Je me suis confinée dans mon petit cocon de lumière et de fausse fourrure, perchée sur mon sixième étage telle une Raiponce alanguie. Les mots me manquent, et parfois ma voix aussi. Alors je chante. Je m'apprivoise moi-même, comme le renard du petit prince. J'apprends à me connaître.

Mots des maux à maux des mots. J'ai décidé de cesser d'employer les mots comme des outils. Maintenant, ils sont devenus mes amis.

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