Chapitre 22 - Partie 3

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Ils finirent par arriver en tête de la colonne. L’homme qui semblait la conduire jeta un bref coup d’œil aux deux stoltzt. Il examina un peu plus Saalyn, détaillant sa silhouette autant que le permettait sa tenue de voyage.

— Bonjour, dit-il simplement.

— Voici Gervan, présenta Banerd, notre chef, un modèle d’éloquence comme vous pouvez le voir.

— Tu as ramassé ta poule dans quel bas-fond ? maugréa ce dernier.

— Gervan, voici Saalyn et son disciple…

— Öta répondit l’intéressé.

— Saalyn ?

L’évocation du nom éveilla son attention. Il reporta à nouveau son regard sur la stoltzin, mais son examen était différent. Il l’évaluait. Il détailla le peu de musculature qu’il pouvait voir, essayant de deviner sa tonicité. Seuls les bras étaient nus, mais sans être très développés, ils semblaient témoigner d’une certaine vigueur. Les armes aussi, qu’il avait négligées lors du premier examen, étaient nombreuses pour une simple femme, un poignard passé dans la tige de sa botte, un autre à la ceinture, une arbalète minuscule mais néanmoins mortelle fixée à portée immédiate de la main sur l’encolure du cheval, sans compter l’épée dont il ne voyait que la poignée d’où il était. Il s’appesantit sur le bébé qui collait bien peu avec l’image qu’il se faisait du personnage. En la voyant arriver avec son lieutenant, il l’avait jugée trop vite. Au combat rapproché, il pensait pouvoir la vaincre, mais il doutait d’en ressortir intact. Son évaluation d’Öta fut plus rapide, il était moins bien équipé. Il débutait dans le métier des armes et bien qu’il lui attribua une certaine habileté, il n’en restait pas moins un novice. Mais avec un maître tel que Saalyn, il n’allait pas le rester longtemps. Sans compter que sa taille imposante et sa musculature à l’avenant étaient des atouts avec lesquels il allait falloir compter. Quoiqu’il semblait bien âgé pour un novice. Il avait certainement été apprenti dans une autre corporation avant. Peut-être celle des guerriers, ce qui n’était pas rare pour les guerriers libres. Surtout parmi les stoltzt. Avec leur longue vie, ils pouvaient accomplir beaucoup de choses. Il n’était pas exclu qu’il soit un bon combattant.

— C’est donc vous la grande guerrière libre helarieal, dit-il.

— C’est ce qu’on dit, mais ma notoriété ne vient de ce que je suis la première à avoir été nommée à un tel poste.

— La première à avoir affronté les feythas, abattu la puissance de l’Okarian, affronté les royaumes de l’ouest du temps de leur puissance et vaincu Jergo le jeune.

— On m’attribue beaucoup de choses. Je n’ai pas affronté les feythas, sinon je ne serais plus de ce monde, l’Okarian je n’ai été qu’une épine dans leur pied, agaçante mais pas dangereuse quant à Jergo c’est Öta qui l’a vaincu.

Le disciple était donc plus avancé qu’il n’y paraissait, ainsi qu’il s’en doutait. Peut-être un disciple, mais il savait se servir de sa tête. Parce qu’il doutait qu’il ait pu affronter l’ancien marchand d’esclaves de front, même avec cinquante guerriers libres et une frégate helarieal. Il avait su élaborer un plan qui avait donné la victoire à une troupe inférieure en nombre et en puissance. Dans quelques années, il ferait un adversaire redoutable.

— Vous allez chevaucher avec nous ? demanda-t-il.

Elle prit du temps pour répondre. Elle estima le retard que cela lui apporterait. Bien peu si on jugeait de la distance qui restait à parcourir. Mis en balance avec les liens qui pouvaient se tisser avec ce chef de bande, elle l’estima faible. Son métier était dangereux, elle ne manquait jamais une occasion de se faire de nouveaux alliés. Cela s’était déjà avéré utile.

— Pas au-delà de Karghezo. J’ai une mission en cours.

— Ça me convient.

Les deux guerriers libres prirent leur place en tête de la colonne en compagnie de Gervan et de Banerd.

Le soleil n’était plus très haut au-dessus des montagnes occidentales quand les murs de Karghezo apparurent à leur vue.

— C’est ici, que je vous quitte, dit Saalyn.

— Bonne chance, dit Gervan.

— J’espère que vous retrouverez la mère de cet enfant, lui souhaita Banerd.

— Ça se présente bien. Ils se sont crus malins, mais ils n’ont pas pris assez de précautions. Avec un peu de chance, ils seront encore à Karghezo.

— Je crois que nous sommes appelés à nous revoir.

— Qui peut le dire dans ce monde ? Il y a beaucoup de royaumes.

— Mais deux routes seulement qui les relient tous.

Elle hocha la tête pour affirmer son accord.

— Chaque royaume ne se limite pas à ces seules routes, tempéra-t-elle.

Puis elle précéda la colonne pour se présenter à la porte. Avec les sauf-conduits dont elle disposait, ce n’était qu’une formalité. Elle savait aussi que le garde l’ayant vue arriver avec les mercenaires, ces derniers verraient leur entrée facilitée. En général une ville prenait de nombreuses précautions quand elle accueillait une troupe aussi nombreuse et aussi armée. Mais la confiance dans les guerriers libres, tout au moins en Yrian, était suffisante pour qu’ils constituent le meilleur des passe-droits. Ça expliquait pourquoi les troupes du style de celles de Gervan essayaient d’en intégrer dans leurs rangs, en plus d’avoir un bras de plus pour se défendre des pillards. Elle espérait qu’ils lui en garderaient une certaine reconnaissance.

Maintenant l’enquête allait réellement pouvoir commencer.

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