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Pythna DS

Chartres.

Auteure des livres Ma schizophrénie (autobio), Lucie, Elena, Fanny & Nadja parus chez Art En Mots.

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Œuvres

Pythna DS

Capella, jeune femme décalée et hors du temps, s’était installée la semaine dernière dans le nord ouest Argentin. Originaire d’une grande ville de France, elle vivait aujourd’hui auprès des montagnes reposantes de son véritable pays.
Dans une vieille maison héritée de sa tante, Capella parcourait doucement les pas de celle-ci, Arancha, écrivaine et médium reconnue du village. La femme était décédée quelques mois auparavant, empoisonnée par son amant. Capella avait reçu de cette femme l’amour d’une mère et un enseignement du cœur que chacun devrait recevoir. Le peintre du village avait offert à Capella, lors de son arrivée, un tableau de sa tante trônant désormais parmi les œuvres accrochées aux épais murs en pierres de la maison.
Après une après-midi passée à trier ses ouvrages de réflexion, Capella ferma les longs rideaux noirs en velours, alluma trois bougeoirs d’autant de bougies et s’assoupit sur son canapé aux mille tissus. Le salon, sombre, décoré aux goûts de sa tante, invita la jeune femme au voyage de l’invisible, dans les poumons du vrai. Le feu de la gigantesque cheminée s’éteignit, laissant Capella s’envoler sereinement dans un état de méditation profond.
La jeune femme, ressourcée, se réveilla avec l’envie subite de jeter un œil à son nouveau grenier. Elle enfila son châle couleur émeraude et se dirigea sans attendre vers les combles. Bloquée par le temps, la porte en fer résista à Capella qui dû forcer le passage. La jeune femme découvrit alors une grande salle vide, n’hébergeant que quelques poupées colombiennes, comme délaissées par l’ancienne habitante. Une malle en bois, ouverte, y avait également trouvé sa place. Capella s’en approcha et y discerna, posée sur un tas de romans et livres que sa tante avait certainement dû écrire dans sa jeunesse, une boite ronde complètement ensevelie par la poussière. La jeune femme l’attrapa joyeusement et redescendit au salon. L’escalier du grenier l’emmena auprès de son guéridon, où elle y posa sa trouvaille. Sur un air de Lydia Lunch, Capella rangea ses lectures du moment de sa table fétiche - octogonale à trois pieds - et y déposa un tissu déchiré près de son trésor. Elle s’assit sur sa chaise bancale, recouverte de sa tenture digne d’une voyante parcourant le monde dans sa caravane. Un coup de main plus tard, la poussière vola ; Capella y aperçut la splendeur de sa découverte. Un magnifique coffret rond en cuivre, tombée de son grenier.
La jeune femme ouvrit délicatement le mystère. Elle y découvrit un jeu de memory fabriqué main. Une quarantaine de ronds en bois n’attendaient qu’à être découverts. Capella observa cette beauté oubliée. Des illustrations représentant des humains, des spirales et symboles étranges y étaient gravés. Les pièces avaient dû ensuite être peintes par petites touches bien placées. Le jeu semblait chargé d’énigmes. Les couleurs jaunies et adoucies par le temps n’apaisaient aucunement la force puissante que dégageaient les illustrations. Le tout donnait un caractère crypté au jeu. Capella contempla chaque recoin de ce mystère sortie de l’oubli.
Escortée par son greffier, la jeune femme décida d’entamer une partie. Elle déplaça le jeu sur la longue table à manger. Capella se sentit euphorique et paradoxalement d’un calme intérieur intense ; elle ressentait quelque chose monter en elle. Elle retourna délicatement les pièces, une par une, observant chacune d’entre elles. Cette lenteur des mouvements emporta la jeune femme dans un raisonnement soudain. Ses pensées défilèrent à la vitesse de la lumière, l’amenant à la conclusion que ce jeu, le memory, intégré dans l’éducation dès le plus jeune âge et dans la vie de tous les jours des adolescents et adultes sortis de l’éducation depuis bien longtemps, pourrait bien changer la face du monde… Ou du moins l’améliorer grandement. Dans l’euphorie du déclic, elle sauta sur son téléphone et s’empressa de composer le numéro de Syrius, ami de sa tante devenu à son tour un grand ami de Capella.
– Ramène toi, lui répondit-il de sa voix basse, profonde et puissante.
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Pythna DS


Salut,
Une promesse mutuelle avec une vieille amie me pousse à t’écrire cette lettre. Je la déposerai dans la nuit à Perpignan, calée sous le cendar d’une table de café. Celui réputé pour la richesse de ses livres ésotériques en libre accès. Je ne sais pas qui tu es, toi qui tomberas sur mes quelques mots. Peu importe, si tu viens boire ton café ici, c’est que quelque part on se ressemble.
Il est vingt heures trente, ma dernière soirée en France. Je t’écris d’un autre bar, similaire cependant, dans une grotte au pied des Pyrénées. De l’extérieur, on ne devine pas le lieu. Aucune pancarte, pas de terrasse. Il paraît être une vieille maison taillée dans la montagne, laissée à l’abandon. Un étroit chemin en pierre nous y amène, avant de disparaître dans la nature. Sur la porte d’entrée, rouillée par le temps, sont gravés deux serpents formant le nombre douze. Seuls les habitués et invités la franchissent. À l’intérieur, une atmosphère sauvage, presque animale, s’y dégage. De simples bougies éclairent les murs froids de la grotte. On aperçoit dans la pénombre quelques tableaux anciens, tous ensanglantés d’une façon ou d’une autre. Au-dessus de ma table, une toile accrochée à une chaîne en fer vibre au passage des serveurs. Une dame en robe rouge, peinte sur un fond à l’apparence crade, essaie de s’en échapper. Sa bouche ouverte, ses dents vampiriques hurlent sa douleur. Sur le comptoir, au côté de la carte des boissons traditionnelles du lieu, une brochure ornée de dentelle noire présente les objets sexuels en vente à l’étage. Des salles illuminées par les forces qu’elles dégagent accueillent les couples et toutes personnes voulant tester de nouvelles expériences.
À mon entrée, la serveuse squelettique au teint blafard m’a tendu la spécialité du bar. Sur un plateau en cuivre gravé de symboles obscurs, un joli verre au rebord argenté qu’elle a soigneusement rempli d’une louche de sang et un shooter de sperme assorti d’une poudre de racine végétale au choix. Passage obligatoire, c’est le rituel. Une dose d’essence humaine…
On est à La Sanguinale. Ici, le temps et les distances s’oublient. Les esprits se rencontrent, se percutent entre eux pour ne devenir qu’Un. Lieu idéal pour t’écrire, pour un dernier moment de contact avec l’humain. La mort est acceptée et comprise de tous. Les âmes qui s’y aventurent sont toutes conscientes de ce qu’elles sont. Des âmes en errance prêtes à revenir à tout moment, à retrouver enfin la vraie lumière. Cette lumière perdue, oubliée par beaucoup.
T’écrire me soulage. Cette lettre annonce la fin d’un bonheur bloqué par la chair, par le temps. Mon corps m’étouffe et m’emprisonne. Je ne mange plus, je ne l’alimente plus. La bouffe est un poison qui me ramène les pieds sur terre, avec son lot d’émotions, d’angoisses, de bruits infernaux… Le manque de nourriture me rapproche chaque jour un peu plus d’où je viens. Je ne suis pas d’ici. Mon enveloppe se dégrade lentement. Je rejoins en douceur ce monde léger, celui où l’intensité de la paix, le bonheur, l’amour infini ne peuvent être décrits. Ce monde où l’on est le Tout.
La vie d’humain ne correspond pas à ce que l’on est, ces esprits enfermés dans ces machines détruites. La serveuse me regarde de son comptoir poser mes mots sur papier. Ses grands yeux livides paraissent vidés de toute forme de vie humaine. Elle aussi est en attente, c’est évident. Je me demande quel déclic la poussera à franchir la barrière, à lâcher prise. Cette femme me fait mal. Les entités du bar sont pour la plupart très aimantes, le cœur sur la main. Au fond, un vieux monsieur portant une longue barbe grise tressée nous observe en silence d’un regard inquiet, impuissant. Ses yeux bleus me mettent face au malaise que j’impose malgré moi à chaque nouvelle rencontre…
C’est justement pour épargner à mon entourage la vue de mes yeux cadavériques, de mon corps misérable, que j’ai décidé de prendre le large. Me prendre en main, me bouger enfin, pour rejoindre la fréquence qui me correspond. Je prendrai le train, demain à l’aube, pour l’étranger. J’emporterai un gros plaid, quelques bougies et la reine des plantes meurtrières. Je connaissais un village abandonné là-bas, perdu au milieu de grands arbres. Oublié de toute civilisation. Bel endroit pour y passer ses derniers jours, bercé par les vibrations du Tout. Ce Tout qui m’extirpe peu à peu de mon fardeau. Je le sens tirer mon âme accrochée.
D’apparence détruite et finie, je m’en vais rejoindre le réel.
Je te remercie d’avoir pris de ton temps, certainement précieux, pour lire ces quelques mots qui te sont adressés. Et… Sache que l’on se rencontrera.
Pepita
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