Choisir soigneusement le stylo parmi les quatre ou cinq alignés sur la table impeccable. Ouvrir le cahier, lisser la page comme pour l'apprivoiser, tracer la première lettre avec une majuscule et laisser la pointe du stylo caresser le papier. Certaines plumes grattent ou rayent la surface. Ceux-là sont éliminés ainsi que le clavier.
Non l'écriture : c'est tracer des lettres sur une page blanche. Les carnets à lignes conviennent pour les notes de voyage ou les idées en instance. Pour écrire, laisser filer son imagination au rythme des mots, des virgules, des phrases, il faut ce vide à s'approprier. Cette liberté de créer un lieu, une ambiance, un personnage au gré du souffle gonfle mon cœur de joie. Le temps n'existe plus, les mots coulent s'alignent, le texte s'articule et met en scène un univers, une vie.
Une surprise pointe au détour d'un paragraphe quand le destin d'un personnage dévie du parcours qui lui était assigné. Le cœur bondit, alors, dans l'allégresse d'une péripétie imprévue. Mon héros vit, me fait vibrer.
Une pause intervient avant d' enchainer, d'installer une rencontre, de faire entrer un second rôle du fond des coulisses. Cette magie d'un instant se prolonge dans la rêverie : et si … non, plutôt si ?Toutes les alternatives sont permises. D'émotion, Le rouge m'est monté aux joues. Ensuite vient la relecture comme le peintre met son esquisse en couleurs, c'est le délice des détails, de la chasse aux clichés, des petites touches avant d'oser le point final.