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Clef-Clef

Clef-Clef
Dans un monde où Cali, la grande Reine des Démons, sévit sur le monde apportant terreur, destruction et mort, la prophétie du Réparateur et des Anges Orphelins fait un ravage parmi les vivants. Surtout depuis la naissance de Anika, princesse du Royaume d'Equiviel et en partie Albinos. Elle porte sur ses épaules le lourd fardeau d'une prophétie hasardeuse et transformée par le temps.

D'un autre côté, Sylas est Purificateur. Depuis qu'il est arrivé dans une petite auberge d'Equiviel, ce loup solitaire ne cesse de faire des rencontres lui barrant sa petite route tranquille. Il finit même par être embarqué dans cette prophétie dont il n'a que faire et n'est pas au bout de ses peines.

Suivez une aventure remplie de mystères et de quêtes, de monstres et autres fantaisies.
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Clef-Clef
Je vous présente l'encyclopédie de l'œuvre principale " LE PURIFICATEUR et la Prophétie des Anges Orphelins " regorgeant de monstres tel un bestiaire mais aussi de races, de fiches personnages, de fiches sur les royaumes, sur l'histoire, les mœurs et autre informations sur le monde.
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Défi
Clef-Clef


Note de l'auteur : Cette nouvelle contient des scènes violentes et horrifiques.

— Quel abrutit ne sale pas sa viande pour en relever le goût ? Et puis quelle quantité désastreuse ! Qui vas-tu nourrir avec ça ? Je me le demande !
Gras était l'homme qui s'énervait sur son assiette à peine remplie. Il avait retiré la veste luxueuse qui pouvait cacher cette graisse débordante pour mieux rassasier le monstre qui lui servait de ventre. Ce ventre était si large, si rond, aussi tombant que les seins d'une mamie mal affamée. Sa chemise recouvrait à peine la moitié de sa bedaine plus présente que son aura elle-même déjà impressionnante. Et cette chemise, grasse, absorbait la sueur dégoulinante et débordante autant que ce surplus de matière. Les auréoles étaient si grosses et puantes qu'elles recouvraient la dose de parfum impressionnante dont il avait l'habitude d'utiliser à l'égale d'un gel douche peau-grasse. D'ailleurs, sa chemise avait jauni à des endroits improbables outre les zones les plus arides au liquide des obèses confirmés. Dans le dos, sous les seins, même au niveau du col et en dessous des épaules. Aussi trempé que s'il était sorti en temps de pluie, comme vache qui pisse. Porter un pantalon aussi élaguant le rendait écœurant par ses plus de 200 kilos sur pattes. Il serrait ses cuissots comme de la viande lacérée par de la ficelle de cuisson faisant davantage ressortir ses excroissances exorbitantes et répugnantes. Même noir, impossible de rater la lumière luisante que créait l'effet de ses fluides sur le tissu.

On aurait dit un porc apprenant à manger avec élégance. Absolument rien n'allait dans ce décor. Une pièce luxueuse d'un restaurant gastronomique ou était posé sur la table nappée une jolie assiette sertie d'un met aussi coûteux que délicieux. Un haut chef attendait le verdict avec angoisse d'un des plus célèbre et ragoûtant Gourmets auprès de journalistes moqueurs et à l'affût du moindre nouveau scandale culinaire. Et au milieu de ce décore, un monstre possédant même un nom, goûtait se plat raffiné dans un décor indécemment sobre et chic et osait s'en plaindre comme si on avait osé lui donné un excrément de la dernière fraîcheur.
Il avait beau mâcher avec délicatesse, ses joues rebondissaient sur sa mâchoire et ses lèvres s'entrechoquaient et s'aplatissaient vers l'avant comme si elles voulaient se déchirer et fuir de leur propre corps honteux.
— Tu me dégoûtes ! C'est ignoble ! Tiens, mange ! Mange ta pourriture ! s'esclaffa-t-il d'horreur tout en postillonnant.
Sugar lui tendit l'assiette qu'il lui avait préparé avec anxiété, l'obligeant à goûter à nouveau son propre plat. Avec torpeur, il prit une fourchette de sa viande, puis de son accompagnement et fut encore plus dévasté de ne pas comprendre la source du problème. Ses yeux tremblaient de crainte sur un visage suant l'incompréhension dont il était orné d'un rictus de honte. Les vautours se délectaient de cette réaction enrichissante pour leur futur article.
— Alors ?
— Je... Je ne sais pas monsieur... arriva-t-il néanmoins à bafouiller entre deux tremblements.
— Tu ne sais pas ? Ooh.. Tu ne sais pas... répéta-t-il encore une fois, ironiquement. Bah je vais te le dire moi, mon petit. Je préférerais manger les excréments de mon chien plutôt que de donner ne serait-ce que le minimum des points à ta bonne merde à peine moyenne. Et tu payes l'équivalent de plus d'un salaire pour apprendre à cuisiner ? Réoriente-toi. Parce que c'est juste pas possible de payer autant et de me sortir une telle catastrophe des fourneaux.
Un cri de désarroi étouffé dans un sanglot résonna dans la pièce. Le jeune chef s'effondra, détruisant ses genoux dans un fracas inquiétant. Il se tenait le visage couvert de larmes et de morve qui se mélangeait peu à peu à sa bave, honteux face à un tel discours. Son corps tremblait, rejetant totalement les paroles énoncées par ce tyran qui essuyait avec acharnement son visage trempé par tant d'efforts. Aucun mot n'arrivaient à la bouche du malchanceux; seulement des gémissements et des pleurs incessants.
Rabattant correctement son col qui s'était retournée par le mouvement de ses bourrelets lors de la dégustation, il releva son menton perdu dans toute sa chair encore outré d'une telle médiocrité. Il empoigna sa veste disgraciée au moment ou il l'a porta, et l'ajusta, la ferma. On pouvait entendre les boutons crier à l'aide. Le trou par où ils passaient donnaient la vision sur sa chemise blanche se délavant au rythme des minutes. Et aussi bien que ses cuisse, son buste était ficelés; les poignées prêtent à se propulser loin de son immondice d'acheteur.

*

Salades, nouilles instantanées, Donuts, Beignets, bacs de glaces, confiseries et d'autres sucrerie s'amassaient de plus en plus sur le tapis roulant de l'hyper marché. La caissière avait ce sourire crispé et insultant devant son client. Le jugeant de haut en bas, elle pointa du doigt le tas d'articles se présentant à son guichet et demanda :

— C'est pour vous tout ça ? C'est repas de fête dites-donc ! se moqua-t-elle.
— En quoi ça te regarde, grosse truie ? rétorqua-t-il.
Elle n'était certes pas fine, mais il était tellement mal placé pour faire ce genre de remarque qu'elle ne put se retenir de prononcer son petit rire hautain. Ses pensées étaient aussi faciles à deviner qu'une pancarte éclairée au-dessus de sa tête. Trouver pire que soit est toujours rassurant pour notre ego. Elle se prenait pour la plus intéressante, la plus belle, la plus bandante face à lui, gros tas miséreux et bouffi.
— Qu'est-ce que tu regardes grognasse ? Ça t'amuse tant que ça de te comparer à moi ? C'est pas moi qui vais te faire oublier ta petite vie misérable de caissière bon marché trentenaire et sans diplôme pendant que je touche facilement le triple de ton salaire.

Et sur ses paroles, il finit de ranger son garde mangé emballé et lui tendit un beau billet de 100, cash. Et d'un sourire défiguré par ses bourrelets faciaux, qui se voulait suffisant, il lui dit :

— Gardez la monnaie.
Sur le chemin du retour, quelle ne fut pas sa joie en pensant à tout le festin qu'il allait pouvoir ingurgiter sans relâchement. Sa bouffe avait beau l'étouffer et l'attirer vers l'aimant de la terre, son sourire surpassait toute distraction.
Une fois rentré chez lui, Sugar fut forcé de constater qu'il n'allait pas pouvoir être seul comme il l'avait tant imaginé. Sa chère sœur maigre, secrétaire stricte et ordonnée avait débarqué sans prévenir et étant en train de finir de jeter les derniers déchets laissés sur le sol comme le devait être une porcherie. Les morceaux séchés de pain, ceux de pattes et de beignets à moitié mâchés : tout avait disparu. Tout, sauf la froide colère d'Andy. Ses sourcils se froncèrent quand elle vit les deux énormes sacs de course de son frangin et alors, elle s'énerva davantage en commençant sa crise par un long soupire.

— Tu ne m'avais pas prévenu que tu venais...
— Non. Non, j'ai pas prévenu non. Et tu pourrais au moins me remercier d'avoir tout nettoyé et rangé pour toi. Tu sais combien de temps ça m'a prit ? Est-ce que tu as ne serait-ce qu'une toute petite idée de toutes les cochonneries qui traînaient partout dans ton appartement ? Il y a une infestation de fourmis et de verres d'insectes ! Tu vis dans une porcherie Sugar, c'est inadmissible !

Notre gourmet crissa des dents et détourna la tête. Non pas qu'il était honteux, mais la joie que lui procurait la visite de sa sœur était indéniable. Ce plaisir débordait tellement, qu'il ne l'a salua pas, ne l'a remercia pas, et ne croisa même plus son regard. Il se contenta juste de se précipiter vers le congélateur avant que ses glaces ne fondent et ses autres mets de haute consommation ne perdent de leur fraîcheur.
— Arrête d'agir comme ma mère Andy, marmonna-t-il.
— En parlant de maman, j'ai une nouvelle à t'annoncer.
— Quoi ? Elle est morte ? demanda-t-il d'une voix saoulé sans un intérêt particulier pour l'être lui ayant donné naissance.
— Merci de t'en inquiéter, mais non, elle n'est pas morte. Pas encore du moins. Nous avons seulement prit des mesures pour améliorer ta situation.
— Ce ne sont pas tes affaires, sœurette, grogna-t-il en mettant un accent particulier au nom familial.
— Plus que tu ne le penses Sugar. Dés demain, une voiture viendra te chercher pour t'emmener dans ton nouveau... Chez toi. C'est un centre pour les personnes comme toi, tu comprends ? Ils vont t'aider à réguler ta consommation, ton besoin compulsif de manger et d'avoir la bouche pleine. Et aussi ton gros problème de poids. Ton très gros problème de poids même. Tu redeviendras un peu plus décent, tu vois ? Normal. C'est pour ton bien.
Plus les secondes passaient, plus la chair de ses doigts boudinés rentrait dans celle de ses paumes. Il bouillonnait de l'intérieur et devait penser " Pour mon bien, tu parles ! Je ne veux pas y aller ! ". Il devait hurler à l'intérieur de sa graisse, mais il aurait beau hurler dans ses pensées ou à l'intérieur de son petit cœur gras, que son lard rendrait le moindre son inaudible : il absorberait chaque bruit. Ne répondant pas, sa frangine continua.
— Donc... Pendant que tu rangeais ton nouveau repas dans le frigidaire, pour t'empêcher de t'empiffrer davantage, je t'ai pris tes clefs et je te les rendrais au retour de ta cure. Tu ne pourras pas acheter plus que ce que tu n'as déjà. J'ai aussi pris soin de nourrir Nougatine et de jeter toutes tes merdes que tu gardais à l'intérieur de ton garde-manger. Bien, sur ce, je vais te laisser avant que tu ne me pique ta crise.
Ses pas sonnaient lourds dans les oreilles de Suagar, comme une punition de plus.

TAC, TAC, TAC.

Ils lui transperçaient les tympans à un point ou il n'arrivait même plus à entendre sa propre respiration, forte et humide, créant une buée épaisse couvrant en partie sa vision.
TAC, TAC. HIIIIIIIiiii...
Le gourmet était paralysé par l'angoisse et la rage, tout raisonnait dans sa tête; Ses talons, les battements de son cœur, l'appétit qu'assouvissait bruyamment son petit chien, les paroles prononcées, la cure, sa famille, son poids.

CLAC.
Puis son souffle se coupa net; comme si son corps avait subit un arrêt dans le temps pendant que le monde entier continuait de tourner autour de lui. Encore, et encore.
...Clic. Tap, tap, tap..
Et le temps s'accéléra aussi brutalement qu'il s'était arrêté. Avec force, il s'empara des beignets qu'il ingurgita sans même s'occuper de son goût ou de sa matière. La dite matière descendit difficilement dans son estomac, mais il déglutit et empoigna une bouteille d'eau qu'il dévala comme s'il avait couru un marathon. L'eau se déversa en partie sur son buste, coulant le long de sa grosse lèvre, puis de son menton engloutis par son propre corps, le long de ce qui aurait dû lui servir de cou pour venir s'étaler sur sa chemise. Ensuite, Sugar absorba les Donuts tout en se tâchant de couleurs vives, de larmes et de baves. Il empoigna ses deux salades allégées et en déchira le plastique. Il prit des poignées dégoulinantes de pâtes et de tomates, écrasant les ingrédients dans sa chair disgracieuse et dévora une à une le contenu de ses mains. Sans plaisir, il souleva le deuxième plat et l'inclina, faisant tomber peu à peu toute la nourriture dans sa grande gueule immonde et le tâchant davantage d'une sauce jaunâtre.
Préférant garder ses glaces pour la fin, le Gourmet mastiqua crues les nouilles instantanées. Elle craquaient autant sous ses crocs qu'une fois avalées. Le Goinfre avait mal, mais ne s'en plaignit pas pour autant. Sa gorge le grattait, le démangeait à n'en plus pouvoir; mais rien n'importait. Son esprit restait enfermé sur ce qu'il mangeait, comme s'il portait des œillères et que son monde ne devenait qu'un amas de manne.
Recroquevillé sur lui-même, Sugar se brûlait les doigts sur les bacs de glace qu'il tenait fermement contre lui. Sa truffe était anéantie par le froid qui le guettait et qu'il sentait. Le froid avait cette odeur glaciale, mais pourtant si sucré, qui vous monte au cerveau et vous décoince les narines autant qu'elle vous fait tourner la tête. Mais rien ne l'arrêta. A peine avait-il la bouche vide, qu'il reprenait une grosse bouchée de sa pâture et l'avalait aussitôt. Et ce spectacle continua encore, et encore, et encore. Il empilait les pots et bacs. Un premier, un deuxième, puis un quatrième. Ses lèvres bleues dégoulinaient de rouge, de marron, d'un liquide transparent, et même d'orange. La glace avait fondu et cela lui rappela à quel point il était déconfit lui aussi. Il se gorgea cul-sec et avec douleur, de ce liquide gelé qui lui fit chavirer l'esprit. Laissant tomber le bac, il suivit son mouvement et s'affala sur le sol avec encore cette faim débordante qui le tenait. Et il s'emprisonna dedans.

Faim.
Sugar pleura. Plus il se laissait aller à sa dépravation et à son désir de manger plus le ruisseau de larmes s'accentua et évolua avec ses émotions. Il hurla de rage et de douleur entre quelques sanglots. Malgré ses ongles déjà en sang, il peinait à tenter de continuer de les arracher.

FAIM.

Obnubilé. Il était tellement irrassasiable que manger était devenue une obsession. Ce n'était même plus "manger pour oublier", car sa propre envie de manger le dévorait de l'intérieur et il y succombait sans lutter. Il ne pensait qu'à ça; penser manger, réfléchir manger, vouloir manger, voir manger, manger manger.
Manger.
La viande alléchante avait une odeur baveuse et repoussante. Et il loucha dessus, souriant avec son visage désespéré et ses yeux gonflés.

MANGER.
Et il s'oublia.
Pendant qu'il gémissait sous ses crocs affamés, Sugar continua et continua encore a dévorer cette chair crue ignorant les pleurs et les cris de terreur et de détresse. Il n'arrivait pas à se résoudre ou à comprendre, car il entend manger.
Sous le poids de ses mains immenses, une nuque se brisa en un craquement lourd de sens. Le ventre lui avait été dévoré à pleine mâchoire et comme s'il était garni d'un festin, il savoura cœur, poumons, fois et intestin tout en soupant le sang encore chaud. Il lui rongea les pattes jusqu'à la moelle et béqueta son museau lui entamant les joues sans rater les globes oculaires et la langue de l'animal. L'immondice massacra, absorba le moindre centième de viande de l'animal jusqu'à curer sa carcasse.
Le voile noir qui brouillait son esprit se dissipa une fois qu'il ne lui restait plus rien. De terreur, il découvrit son massacre et le repoussa d'effrois. Son expression fondait, il se liquéfiait.
— Nougatine ! Nougatine, vient là, ma belle !
Mais Nougatine ne pouvait plus venir. Alors il pleura, hurla d'autant plus et se déchira.
Andy dévisagea son frère d'un cri strident. Ses joues se remplirent d'un liquide gastrique. Alors elle vint presser ses mains contre ses lèvres pour s'empêcher de laisser sortir toute sa digestion en plein milieu du salon. Sugar pouvait l'entendre depuis la salle de bain cracher tout ce qu'elle avait ingurgité au déjeuner. Elle sanglotait et dégueulait pendant que son frère, toujours sonné, tremblait de tout son long. Des visions de sa trahison lui revenaient sans cesse, comme si tout était encore présent. Il arrivait encore à sentir la sensation de chaleur et de douceur dans sa bouche ainsi que le goût métallique du sang. Et malgré son chagrin : il bava comme un chien.
Tout s'enchaîna très vite pour le gourmet. Il fut forcé de signer un contrat d'enfermement au sein du centre, puis fut emmené avec dégoût jusqu'à la voiture s'étant déplacé rien que pour lui, gardant encore ses vêtements tâchés par la sueur, les pleurs, la nourriture ainsi que Nougatine. Et ce trajet fut aussi silencieux que stressant. Son esprit fulminait et chauffait au point que même maître de sa réflexion, il n'arrivait plus à suivre la moindre phrase. Et le voilà qui était déjà arrivé à destination. Sa propre frangine n'avait même pas eu le cran de le suivre dans sa quête difficile. Et lui, avait la tête baissé, honteux, peureux, et n'arrivant pas à faire le deuil de la seule amie qu'il n'avait jamais eu.
Sugar avait eu le temps de découvrir sa chambre, quelques résidents, l'établissement et autre divertissement. La nourriture était servie en si faible quantité que son corps s'affaiblissaient au point d'avoir la tête d'un malade blanchis. Il n'avait toujours pas d'amis, ni de visiteurs, et il n'y pensait même pas pour ainsi dire. C'était Nougatine, Nougatine, Nougatine. Une lutte intérieure entre celle de l'homme qui pleurait son compagnon et celui qui l'avait trouvé aussi appétissant que succulent faisait rage en lui. Et il avait faim. Terriblement faim. Son ventre rugissait et à chaque fois que de la nourriture lui passait sous le nez ou qu'il en sentait, il se mettait à allécher considérablement. Jusqu'au jour où il tenta de taper un croc dans l'épaule de son voisin. Il s'était également mis à allécher devant la viande des autres. Même la graisse lui faisait envie, il aurait pu manger n'importe quoi pour satisfaire sa soif inépuisable.

— Mais qu'est-ce que tu fous ? AAAH ! Mais lâche moi ! Tu me fais mal ! hurla-t-il.
Croque. Sugar venait de mordre sa main, enfonçant ses dents dans la chair, jusqu'au sang. Et il s'en lécha les lèvres quand on l'écarta de son lard. Ses yeux n'avaient plus rien d'humain. Des yeux obsédés par une seule et unique chose, veineux et fatigués. Plus aucune force impressionnante n'émanait de lui. Il était vidé de toute énergie autant mentale que physique. Mais aussi épuisé soit-il, que cet ours enragé se débattait comme un homme mourant de faim a qui l'on venait de retirer ce qui lui permettrait de vivre. Il griffa le personnel, en mordit également et donnait des coups de dents dans le vide. Voyant qu'il allait atteindre la gorge d'un de ses collègues, un infirmier s'empressa de le taser , suant la peur et l'angoisse. Jamais il n'avait eu affaire avec un homme pareil. Et la bête se tortilla, s'épuisa davantage à résister à la décharge avant de tomber raide à terre, inconscient.
Quand il se réveilla, sa chambre avait considérablement changé : ce n'était tout simplement plus la chambre qu'on lui avait attribué. Elle était sombre, petite, et avec pour unique ameublement un lit et un matelas fin et dure, sans couverture. Sugar était enfermé dans une pièce ayant pour seul but de le calmer et de le laisser réfléchir à ses actions. Mais cela n'avait aucun impact pour lui, mise à part le faire vriller davantage. Ne leur avait-elle pas dit qu'il ne supportait pas la solitude, encore plus si piégé à l'intérieur sans aucune issue ? Visiblement non, car l'ex-gourmet trembla de nouveau. Il avait envie de manger, alors il se précipita sur le bois du sommier. Il tenta, encore et encore, mais ne faisait qu'à peine le mâchouiller. Le goût du vernis sec était amer à la longue et laissait un arrière-goût de produits ménagers. Ne pouvant rien en avaler, il se rabattit sur le matelas. Il y alla à pleine dent, sans hésitation et y arracha un bout. Une amertume textile indescriptible suivit de quelque chose d'âpre et de froid se mélangèrent dans sa bouche. Et malgré ça, il essaya d'avaler le morceau de ce qui aurait dû être l'équivalent du nuage le bordant cette nuit. Sugar s'étouffa avec. Il toussa, et toussa encore et alla mettre ses doigts jusqu'au plus profond de sa gorge pour réussir à vomir cette pourriture essayant de l'achever de son pire péché. Recracher cette pièce innocente qui n'a jamais connu la vie le fit revenir à lui. Il regarda ce qu'il avait essayé d'ingurgiter, circonspect avant de prendre peur de sa propre personne.
Sugar s'était recroquevillé dans un coin de la pièce, à l'ombre, observant chaque recoin, lueur et noirceur. Et il se balançait d'avant en arrière, expirant lentement et inspirant profondément. La propre odeur de son haleine mélangée à celles de ses autres fluides l'étouffait et enivrait ses sens. Tel un carnivore reniflant les arômes différents des morceaux d'un corps frais et encore vivant, il se mit de nouveau à baver. La mémoire sensorielle de cette exquise et sanguinolente scène le fit frémir de plaisir. Alors il renifla de nouveau, et longuement, entrouvrant sa gueule faisant apparaître la buée du CO2 qu'il expirait. Il ravalait sa salive qui coulait le long de sa peau et restait fixé sur un seul but, les yeux fixer dans le vide. Manger. Manger était tout ce qu'il désirait et il crèverait pour seulement un morceau de cette chair si tendre. Doucement, il se grignota les joues, les mastiquant généreusement. Son cerveau se sentit revivre d'une nouvelle exaltation troublante. Le sang se mélangea à sa salive qu'il avala avec plaisir. Plus il arrachait et se nourrissait de sa propre chair, plus il en voulait.
Regardant ses mains, il se lécha l'index ce qui le saupoudra d'une excellente sauce sanguine glissant jusqu'à sa paume, entre ses doigts. Il croqua la viande moelleuse et tactile et le fit glisser sur sa langue. Ce petit bout anéantissa le peu de moralité qui lui restait. Et il se laissa agréablement consumer.
Il déchiqueta sa main droite laissant des fibres se coincer entre ses dents jaunis par lui-même. Puis arracha le court adducteur du pouce et n'en fit qu'une bouché bouffie, sans compter son muscle fléchisseur avant de creuser son avant-bras comme un pilon de poulet tout droit sortit du micro onde. La douleur qui aurait dû naître dès le début c'était éteinte au moment ou son sang toucha sa langue faisant court-circuiter les sens du maître et de son corps. Plus il dévorait, plus il saignait et s'affaiblissait. Mais à l'exacte d'être dopé à outrance, tout son corps graisseux tenait le coup malgré des mouvements fébriles et maladroit. Il croqua un bout d'épaule puis goûta également celui de gauche. Satisfait, il tenta d'accéder à ses pieds, mais en vain. Comprenant qu'il ne pourrait pas atteindre cette partie du corps, dans un crie très vite remplacé par de la complaisance, il brisa son gros doigt de pieds. Le bruit du craquement ne fit qu'exciter ses sens et une fois l'os brisé, il le tortilla dans tous les sens et tira de plus en plus dessus, sur ce petit bout alléchant et prêt à être absorbé à son tour. Le porc réussit à l'arracher et alors il se disloqua de son corps. Pleurant de plaisir, il en sourit en regardant son futur en-cas se séparer divinement de son pied. Comme pour la mozzarella d'une pizza, des petites fibres restaient accrochées avant de se déchirer et de retomber avec souplesse. Il croqua son orteil comme une petite saucisse d'apéro, cassant l'ongle qui venait avec la viande dans sa bouche et passa au suivant en avalant le tout.
Il posa son index gauche, encore miraculeusement intact, sur l'un de ses globes oculaires et le tâta, le toucha. Son doigt rentrait divinement bien dans cette sphère miraculeuse et douce. Cet humide liquide visqueux enveloppait son touché et alors, il le rentra davantage perdant la vue. Des milliers de couleurs qu'il n'avait jamais vue auparavant se mélangèrent les unes entre les autres comme des pop-up de milliards d'arcs-en-ciel de toutes sortes et de toutes formes. Des flashs inégalables et plus beaux, scintillants et pétillants qu'un feu d'artifice. Ce spectacle éblouissa son cerveau et donna bien plus de valeur à son organe. Se léchant les babines grignotées par la faim et autrefois le stresse, il l'arracha de son entre. Il entendit le détachement du nerf optique qui le fit se tortiller de rire. Ca lui rappelait ses mains déroutantes et de toutes les couleurs possibles faites en usines, que l'on pouvait gagner dans des gachapon ou encore des foires basiques, avec pour but s'accrocher peu importe sa trajectoire. Le sentiment d'étirer un fil extensible et de le briser était aussi satisfaisant que d'entrer cette grosse bille dans la bouche et de l'aspirer avec un bout de sa ficelle comme on le ferait avec des nouilles ou des spaghettis à la sauce tomate. Et malgré l'absence de toute sensation désagréable, il se sentit si faible, si impuissant. Mais il ne cessa pas. Il eut du mal à croquer son globe oculaire qui glissait entre ses dents. Puis une fois coincer entre son reste de joue ensanglanté et sa langue, il fit pression, doucement lentement. La sensation était la même que pour une tomate cerise. Mais une tomate cerise moelleuse, douce, visqueuse et glissante. Du jus en gicla légèrement avant qu'il ne sente cette étrange sensation de croquer dans de la gélatine compactée.

Au même moment, il se mordit la langue. Et il sut ce qu'il voulait goûter en dernier. S'il essayait de manger ses tripes, il s'évanouirait et mourrait avant de pouvoir ne serait-ce qu'en lécher le bout tandis que la langue n'était pas inaccessible. Alors il avala ce jouet amusant et tira la langue tout en levant bien haut la tête pour empêcher celle-ci de tomber autre part que dans sa gueule béante. Et il la coupa en deux, sèchement. Tout tournait autour de lui. Sa bouche se gorgeait de sang à un point qu'il n'arrivait même plus à l'avaler et il s'étouffa dedans. On l'entendait boire la tasse, cracher, tousser ce qui lui restait de force. Il lutta aussi longtemps qu'il pouvait, mais l'enfer n'attends pas. Son unique œil roula en arrière et il resta inerte, assis, comme une masse laissée à l'abandon depuis des années.

Et le sang coulait, coulait comme pour un jour de fête. Il ruisselait sur ses membres et se faisaient absorber par ses vêtements salles et mouillés, maintenant qu'il avait arrêté de le boire.

PLIC. PLOC. PLIC. PLOC.
Une mare de sang s'était rependu sur le sol. Sugar baignait dans son pêché, l'ayant consumé.
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