Polyphème
Ce gamin était pénible.
Il pourrissait mes cours depuis le début de l'année scolaire avec une arrogance qui de par son ampleur aurait pu être qualifiée de véritable don. Un jeune certes sans avenir mais qui semblait avoir été placé sur ma route par la vie pour me mettre à l'épreuve.
Ce lundi matin fut le jour qu'il choisit pour révéler la quintessence de son potentiel de nuisance et par la même pour évaluer les limites de ma patience: alors que je multipliais à son intention les demandes de silence dans l’espoir de terminer mon explication contextuelle sur « l'aveuglement de Polyphème » de Pellegrino Tibaldi, le jeune homme me gratifia d'un narquois :
– Quoi m'sieur ? Reste tranquille, de toute façon tu vas me faire quoi ? Reste détendu et fais ton cours...
A la fois écœuré par tant de désinvolture et déjà moralement éprouvé par mon week-end sacrifié au sein de ma belle-famille, je me portai à son niveau et pour seule réponse à cette arrogance, je lui plantai un crayon dans son œil bovin.
Mais rassurez-vous j'utilisai un crayon de couleur, nous étions tout de même en cours d'arts plastiques...
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